• Menu
  • Menu

Simba, Luna et Capitan : Le bon, l’abrupte et le sauvage

21 octobre-11 novembre 2015

Warning !

Attention cet article est assez long, il retrace nos trois semaines de bénévolat dans la jungle bolivienne auprès des pumas. Si vous avez la flemme de tout lire ^^ vous pouvez passer directement aux photos des trois héros de notre histoire en cliquant juste ici.

Le but de l’association Ciwy

Basée en Bolivie, Comunidad Inti Wara Yassi, pour « Soleil, Étoiles, Lune » est une association à but non-lucratif de restauration de la faune. Elle s’occupe entre autres de recueillir des animaux blessés, malades ou issus du marché noir avant de les relâcher quand cela est possible. Elle possède trois parcs, au cœur de la jungle amazonienne. Nous étions dans le parc Jacj Cuisi.

Les animaux recueillis au sein des parcs sont principalement des oiseaux, des singes et des félins. Le parc où nous étions s’occupe uniquement de pumas. La plupart ont été séparés très tôt (avant la fin de la période de sevrage) de leur maman, qui a été capturée/tuée par l’Homme. Il existe en effet ici un marché noir assez important qui fait que les bébés jaguars, pumas, singes ou autres animaux « à la mode » sont vendus à des familles comme animal de compagnie. L’animal grandissant et voyant qu’elles ne peuvent plus s’en occuper, les familles finissent par l’abandonner ou le confier à l’association (celle-ci refuse d’acheter les animaux pour ne pas contribuer au marché noir). D’autres viennent de zoos ou de cirques et ont des séquelles dues à des violences physiques faites par les dompteurs.

DSC04512
Quand CIWY le peut, elle les remet en liberté, dans un environnement adéquat. Malheureusement, la plupart du temps, c’est impossible. Il faut savoir que l’association ne possède aucun animal. Ils sont tous détenus par le gouvernement bolivien dont il est très difficile d’obtenir une autorisation de libération en milieu sauvage (le gouvernement a peur que l’animal fasse du tort à l’humain…). De plus, n’ayant pas eu l’éducation de leur mère, les félins sont incapables de se débrouiller par eux mêmes dans la nature. Ils gardent pour certains des séquelles physiques de leur capture ce qui les handicape un peu plus. A CIWY, certains animaux se sont échappés et n’ont malheureusement pas survécu très longtemps dans la jungle.

L’association s’occupe donc de donner une nouvelle chance à ces animaux. A défaut d’une relâche, les bénévoles essaient de faire en sorte que l’animal ait les meilleurs conditions de vie possible, même en cage. Leur rôle est de promener les animaux dans la jungle, de jouer avec eux, de les nourrir. Cela peut paraître contre-nature et illogique et nous étions dubitatifs au début mais nous avons fini par comprendre qu’ il s’agit de donner la meilleure vie possible à ces animaux, en dépit de ce qui leur est arrivé.

Pourquoi avons-nous choisi de faire ça ?

Cela faisait 2 mois pleins que nous étions en voyage. Suite à une triste nouvelle personnelle en France, nous avions un peu perdu la motivation de voyager. Nous avions envie de nous rendre utile quelque part pour donner un nouveau sens à notre aventure. J’ai cherché une solution alternative et c’est là que j’ai trouvé cette opportunité. Depuis le début du voyage (et même avant) nous voulions faire du bénévolat dans un endroit du globe. Étant donné qu’on aime beaucoup les animaux, l’annonce nous a plu. Aider un petit moment des animaux à kiffer la life, quoi de plus beau ? C’est dans ce contexte qu’on est parti en direction de Rurrenebaque. 18 heures de bus depuis La Paz, sur une route de terre, à flanc de ravin (merci Didine pour l’amulette du condor (sécurité en voyage) qui nous a bien porté chance !)… Pour y aller, fallait être motivé, mais ça tombait bien car on l’était ! Ça nous a permis de faire un break, de se poser 3 semaines à un endroit et ça nous a redonné l’envie de continuer à bouger et voir plein de choses par la suite !

La vie au camp

Où ? Qui ? Comment ?

Le parc Jacj Cuisi est en pleine forêt amazonienne. Depuis La Paz, il faut prendre un bus, puis un motocycle, un petit bateau pour aller à San Buenaventura et 45 minutes de voiture. On passera les 3 semaines avec deux autres volontaires, Sam, australien et Max, américain. Angela, italienne est la responsable du parc. C’est peu et du coup il y a beaucoup de travail, on ne chômera pas ! Jaime, un salarié bolivien, viendra nous donner un coup de main à la fin de notre séjour pour nous aider à réparer diverses choses.

DSC04805
La fine équipe

Les conditions sont assez dures et les premiers jours assez difficiles.
Le camp est géré de façon autonome et on est une toute petite communauté même si pleins de petites bestioles diverses et variées vivent aussi avec nous et courent un peu partout. Il n’y a pas électricité et pas d’eau chaude. L’eau qu’on boit vient directement de la rivière d’à côté (filtrée grâce à un filtre à sable biologique). Pareil pour la douche, mais vu la chaleur c’est plutôt agréable. Nous devons nous faire à manger nous même et le confort est très sommaire (dortoirs ouverts sur la nature, matelas de paille, toilette à la turque, douche à température ambiante ….).

DSCF5986

Déroulé de la journée

Le lever est à 06h30. De 06h45 à 07h00, une tâche est assignée à chacun : préparation du petit-déjeuner, nourrir les poulets, nettoyer la cuisine, nettoyer le patio, nettoyer les toilettes.
Ensuite on se met en tenue (comprendre un pantalon pourri, un tee-shirt manche longue et une machette à la main). On n’a pas intérêt à oublier le chapeau anti-moustique pour se protéger des dizaines d’insectes qui volent sans cesse autour de nos têtes à certains moments de la journée.

DSC04825
Tenue type by Loïc 🙂

Direction les pumas pour les promener, les distraire, passer du temps avec eux. Il faut aussi nettoyer autour et dans leur cages, dégager les chemins car des arbres tombent régulièrement…. Retour à midi pour une pause manger et on repart illico pour les nourrir. On termine vers 17h30. Le temps de prendre une douche et il faut aller en cuisine préparer le repas. Coucher vers 21h, exténués. Parce que mine de rien, ça crève tout ça.

Travailler auprès des pumas

Travailler auprès des pumas n’est pas de tout repos, les balades se transforment parfois en parcours du combattant : il faut courir, sauter par-dessus des troncs d’arbres ou se glisser sous des branches à ras le sol. Pareil pour les jeux, jouer avec un puma c’est un peu comme jouer avec un chat…. A quelques détails près…. Au lieu d’un bout de ficelle ou d’une boule de papier, on utilise plutôt une branche voire un petit arbuste ou une noix de coco. Et oui différence de taille oblige ce n’est pas non plus le même gabarit de jouet ; ni la même énergie pour jouer avec et on finit souvent fatigués avant eux.
On n’a pas le temps de s’ennuyer et le vent devient parfois un ennemi redoutable; le toit de la cabane où est stocké le bois s’est décroché, il a fallu le reclouer. Un arbre immense est tombé en travers de la cage d’un des pumas. Il a fallu scier, hacher, machetter, câbler, clouer etc… pour refaire une clôture assez haute.

IMG_9372
Ça c’est fait

Et comme si ça suffisait pas, on est constamment trempé : de sueur parce qu’il fait trop chaud ou d’eau parce qu’il pleut. Nous avons d’ailleurs eu une semaine de pluie non-stop. Nos vêtements ne séchaient jamais. Chaque matin, il fallait enfiler ce pantalon froid et humide ainsi que ces chaussettes trempées. Dur pour le moral. La vie au camp n’est pas facile mais le manque de confort permet d’apprécier encore plus le retour à la vie citadine (quel plaisir de dormir dans un bon lit, de prendre une bonne douche chaude ou de poser ses fesses sur une cuvette de WC quand ça fait 3 semaines qu’on ne l’a pas fait !). C’était un peu comme un retour aux sources, à la nature, et à la dé-consommation (répare plutôt qu’achète à nouveau).

Cooking Time !

La nourriture est uniquement végétarienne pour nous tandis que les pumas se régalent de poulet et de viande de bœuf bien fraîche.
Nous qui nous plaignons de ne pas manger assez de légumes on est servi ! C’est légume à tous les repas. Et on apprend à les cuisiner de tas de manière différente pour ne jamais se lasser. On adore.
La nuit tombe vite et le dîner se prend à la lueur des bougies.

DSC04885

Le samedi, c’est fiesta !

Chaque semaine, on a un jour de relâche le samedi et du coup on en profite pour retourner en ville, dormir dans un bon lit, manger du poisson ou de la viande boire une bière ou deux (ou plus) et jouer au billard avec nos comparses.

IMG_9389 - Copie

Simba, Luna et Capitan

A notre arrivée, Angela nous a confié la responsabilité d’un ou deux pumas : elle m’a demandé de m’occuper de Simba (grand fan du Roi Lion, c’est une belle coïncidence) et Lucie de Luna et Capitan.

Simba

Simba, 14 ans, à été donné à l’un des parcs à l’âge de 9 mois. Il était dans une famille américaine, à La Paz. Il avait été vendu à cette famille par des chasseurs qui ont tué sa mère. Après ça, il s’est retrouvé dans une autre famille, encore en tant qu’animal de compagnie, avant d’être recueilli par le parc.

Il est affectueux et calme. Il était assez joueur sur le runner (espace où il peut courir librement) mais n’aimait pas tellement marcher. Il adorait faire des léchouilles; ça faisait même assez mal à un moment et je me suis souvent retrouvé avec le bras tout rouge. Il restait quand même assez imprévisible et plutôt peureux des bruits environnants.

DSCF5732

Luna

Luna, 7 ans, est arrivée dans un des parcs de Ciwy 2 semaines après sa naissance avec sa sœur après avoir été trouvées à Sucre où un homme essayait de les vendre dans la rue après avoir tué leur mère… Luna et sa sœur étaient très petites, très faible et sous-alimentées. Sa sœur mourra malheureusement quelques jours plus tard. Luna devient aveugle d’un œil, en plus d’autres problèmes médicaux liés à cette capture malheureuse.

Luna est une chieuse, un peu capricieuse et lunatique … Normale c’est une fille 😉 On ne sait jamais comment on va la trouver en arrivant : parfois grognon, parfois flemmarde mais la plupart du temps, elle est très affectueuse et très joueuse. Dès que j’ (Lucie) arrive à la cage, elle est là à m’attendre et cours vers le lieu dédié à l’affection et là c’est caresses, ronron à n’en plus finir et léchage de bras à gogo, ce qui est plus ou moins douloureux. Elle adore les moments où je  cours avec elle autour de la cage avec un petit arbre en guise de jouet. Lors des promenades, elle est toujours sur le qui vive et pique parfois des sprints endiablés sur son chemin assez abrupt (petit clin d’oeil au titre de l’article) tout en montée et en descente ! D’ailleurs, fait amusant, elle râlait et poussait toujours des petits grognement en montant car elle est aussi feignante que nous et déteste ça 😉 On ne s’ennuie jamais avec elle !

DSC04840 - Copie

Capitan

Capitan n’a jamais été habitué au contact humain. Lui et son frère Flashman, ont été pris illégalement quand ils étaient tous petits et élevés comme animaux de compagnie en présence d’un berger allemand. C’est un puma qui reste en cage et ne peut malheureusement pas sortir car il est trop dangereux et imprévisible.

Capitan est très timide, peureux et sauvage. J’ai (Lucie) adoré passer du temps avec lui. Il est vraiment très beau et touchant dans sa façon de vous regarder. A la fin du séjour, je pense qu’il m’avait adopté car il me suivait partout. Je m’asseyais près de sa cage et il restait des heures près de moi à m’écouter. Ça a été assez difficile pour moi de m’occuper de lui car j’étais très peiné de savoir qu’il ne pouvait pas sortir et devait rester enfermé. J’ai essayé de m’occuper au mieux de lui. J’espère au fond de moi qu’il pourra un jour être relâché.

DSC04896


The End

Ce fut au final une bonne expérience. Coupés pendant 3 semaine de toute communication extérieure, on réapprend à vivre simplement : se faire à manger avec des produits frais, mais aussi laver ses habits à l’eau de la rivière, réparer les choses cassées etc… Se passer de tout écran et bosser 6 jours / 7, ça fait du bien ! Les pumas sont touchants et on n’a aucune envie de les quitter. Mais, au-delà de nous, nous sommes venus avant tout pour eux. Parce que ces bêtes, qui n’ont surement pas choisi d’être là, doivent bien continuer à vivre et on essaye de faire en sorte que tout se passe au mieux pour elles. A cause de leur passé, elles ne pourront surement jamais regagner la nature. C’est pourquoi, nous leur consacrons 6 jours sur 7, 9 heures par jour. Pour leur montrer qu’en dépit de leur sort, il peut y avoir, quand même, d’excellents moments à passer ici, au cœur de la jungle amazonienne.

Pour moi, Lucie, cela a été un peu plus difficile. Non pas à cause des conditions de vie, même si à la fin j’avoue que j’en avais un peu marre de toutes les bestioles qui me tournaient autour, mais surtout parce que je m’occupais d’un puma en cage qui n’avait pas le droit de sortir. C’était assez dérangeant et triste pour moi de le voir enfermé et j’aurai préféré le voir libre dans la jungle. C’est pour cette raison, que j’ai eu un peu plus de mal à adhérer au concept de l’association. Mais à force de poser des questions, j’ai compris que dans le contexte, il n’y avait pas d’autres solution pour lui pour le moment. Ce n’est pas l’association qui est à blâmer mais plutôt le marché noir responsable de cette situation. D’ailleurs CIWI met tout en oeuvre pour y mettre fin via des campagnes de sensibilisation. Au final, cela a été une expérience très enrichissante avec ces bons et ces mauvais côtés et je ne regrette pas du tout d’en avoir fait partie.

DSC06671 - Copie
Le dessin que Max nous a donné en partant 🙂

 

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.